Interview d’André : Intervention de Malone en février 2006

Échos de l’ASBBF n° 8
Témoignage d’André, 56 ans
Intervention de Malone en février 2006

Comment gériez-vous vos intestins avant l’intervention de Malone ?

Par des lavements rétrogrades. Jusque +/- l’âge de 13 ans : injection du lavement à l’aide d’une poire, prélèvement digital des selles. Ensuite, pendant plus de quarante ans : injection du lavement avec l’aide d’une canule rectale à ballonnet gonflable (2 litres d’eau à un rythme d’un lavement environ tous les deux jours), évacuation sur la toilette, comme pour n’importe quel lavement par la voie basse.

Comment et pourquoi avez-vous décidé de recourir à l’intervention de Malone ?

Depuis quelque temps, le ballonnet de la canule, même correctement gonflé, ne résistait plus chaque fois à la pression de l’eau injectée dans le côlon, d’où inondations à répétition de la salle de bains.

Quelle information préalable avez-vous reçue ?

Exposés effectués par des médecins, lectures, explications du chirurgien et de la stomathérapeute.

Comment s’est déroulée la préparation avant l’intervention ?

Dans les jours qui ont précédé l’intervention : nourriture pauvre en déchets. Ensuite, premier jour d’hospitalisation pour la vidange des intestins. Assez pénible : après avoir avalé deux doses de laxatif, je suis resté entre 8 et 9 heures assis sur la chaise percée. Même si je savais que cela allait se passer ainsi (fruit de l’expérience de la préparation en vue de l’implantation de mon premier sphincter urinaire artificiel), ce ne fut pas la joie. Dès lors, j’avais demandé à disposer d’une chambre seul pour cette première journée.

Comment se sont déroulées l’intervention et l’hospitalisation?

Entrée en clinique le lundi après-midi, vidange des intestins le mardi, intervention le mercredi matin, sortie le lundi suivant … mais c’était limite car les déplacements étaient très difficiles (large ouverture verticale dans l’abdomen, le tout couronné de mes problèmes habituels de marche). Beaucoup de crampes dans les intestins…. Très très pénible… Et de nombreux gaz encore bien longtemps après l’intervention.

Avez-vous un orifice dans le nombril ou dans la fosse iliaque ?

Dans le nombril. C’est plus discret, mais vu les interventions ultérieures sur ce même nombril, question esthétique, ce n’est plus tout à fait cela ! Cependant, dans l’absolu, la stomie dans le nombril est certainement plus discrète que le bouton de caecostomie.

… avec utilisation de l’appendice ou d’un néoconduit avec un morceau d’intestin?

Utilisation de l’appendice.

La valve anti-reflux fonctionne-t-elle correctement ?

A cause d’une vascularisation inhabituelle de l’appendice, il n’a pas été possible de réaliser une valve anti-reflux.

Quand avez-vous commencé à pratiquer l’injection du lavement par la stomie ?

Premier lavement près de 4 semaines après l’intervention.

Comment se passent les lavements ? Durée ? Rythme ? …

Je fais un lavement de 2 litres tous les deux jours, si possible le matin (avec de temps à autre une petite exception, quand mes activités l’imposent). Quand tout se déroule bien, les deux litres du lavement s’écoulent en environ dix minutes, et l’évacuation commence même avant que toute l’eau n’ait été injectée. Quand cela se passe moins bien, l’écoulement du lavement peut durer 20 minutes (parfois plus encore, mais il y a longtemps que cela n’est plus arrivé) et l’évacuation peut durer une heure… avec des accidents qui surviennent par après.

Prenez-vous des médicaments ou autres « trucs » pour faciliter les lavements ?

Movicol® (laxatif), magnésium, Lactibiane® (ferments probiotiques), yaourt Activia® .

Une nouvelle intervention a-t-elle été nécessaire à cause de difficultés rencontrées ?

Deux plasties d’agrandissement de la stomie qui Témoignage sur la gestion intestinale Échos de l’ASBBF n° 8 s’était refermée malgré le passage régulier de la sonde dans l’orifice ont nécessité deux interventions supplémentaires (anesthésie générale, 48 h d’hospitalisation pour chaque plastie).

Quelles sont vos principales satisfactions ?

Par rapport au lavement classique par la voie basse (avec canule à ballonnet gonflable) que j’ai pratiqué pendant plus de 40 ans, il n’y a pas photo : finie la gymnastique (couché pour la mise en place de la canule et l’écoulement du lavement, puis déplacement sur la toilette avec deux litres d’eau dans le ventre), moins de matériel à préparer, à manipuler, à emporter quand on déloge, évacuation plus rapide, plus efficace (quand tout ce passe bien…), moins de gaz dans les heures qui suivent l’évacuation.

Quelles sont les principales difficultés rencontrées ?

⇒ J’ai déjà cité la sténose de la stomie, qui a nécessité deux interventions supplémentaires.

⇒ Voici quelques mois est apparue une paresse du côlon (peut-être liée à un pratique excessive des lavements quand l’évacuation n’était pas complète) : certains lavements ont alors duré de 4 à 5 heures. Un retour à une durée normale de lavement (avec des accidents rarissimes) a malgré tout été retrouvé, mais en respectant scrupuleusement le rythme d’un lavement de 2 litres (pas un 1 dl de plus) tous les deux jours, si possible toujours au même moment de la journée, prise régulière de Movicol® et de magnésium. Cela reste cependant toujours du « tâtonnement » : il arrive encore que je ne me sente pas vraiment « libéré » après le lavement, alors pendant quelques jours, je prends un peu plus de Movicol, et j’attends patiemment que 48 heures se soient passées avant de pouvoir refaire un nouveau lavement. Et les gaz sont toujours là, sournoisement présents quand on s’y attend le moins.

⇒ Vu l’absence de valve anti-reflux, les reflux sont bel et bien présents : plus ou moins solides, sonores et parfumés. Et les gaz qui s’échappent par la stomie sont encore plus vicieux que ceux qui s’échappent par l’anus : ils font un bruit de trompette très désagréable, et vraiment rien ne les annonce. La présence de ces reflux m’oblige à porter en permanence une mini-poche sur le nombril. Ce qui ne m’empêche pas de fréquenter piscines et saunas. Dans ces cas, je retire la mini-poche et suis particulièrement attentif à la propreté de mon nombril : je passe régulièrement à la toilette pour le surveiller et le nettoyer.

Après chaque intervention, il a fallu me soumettreà l’obligation de passer la sonde 3 fois par jour dansl’orifice pendant trois mois, puis deux fois par jourpendant 3 nouveaux mois, et enfin une fois par jourpendant les trois derniers mois. Normalement, à cemoment, il suffira de passer la sonde pour chaquelavement, soit tous les deux jours. Cette dernièreétape est prévue pour mai 2008 !

Qu’a changé le Malone dans votre vie ?

Le Malone m’a permis de découvrir les charmes dela route qui mène de Dison aux Cliniques Universitaires St-Luc et les délices de l’attente en polyclinique.Plus sérieusement. Puisque le lavement par la voiebasse devenait de plus en plus ingérable (et étaitpresque à chaque fois source d’explosion liquide,mais aussi de rage), il fallait bien trouver autrechose. Pour mon malheur, j’ai conjugué deux desprincipales complications du Malone : sténose del’orifice et problèmes de reflux. Cependant, j’apprécie beaucoup cette technique bien plus légère qu’unlavement classique et qui donne de meilleurs résultats quand on trouve enfin la vitesse de croisière etque les problèmes « techniques » sont résolus…C’est justement le hic… Voici 20 mois que l’intervention a été pratiquée, et si une vitesse de croisièresatisfaisante a été trouvée à certains moments,cette croisière a parfois des ratés. Actuellement, jesuis toujours à la recherche d’un nouvel équilibre.

Il faut bien constater qu’aujourd’hui j’organise unebonne part de mes activités en fonction de mes lavements. C’était déjà le cas auparavant, mais cel’est encore plus aujourd’hui. Ce qui fait dire à monépouse que ce sont eux qui commandent ma(notre) vie…. Je dois préciser que ceci n’est pas nécessairement lié au Malone, mais à la paresse ducôlon qui est apparue en juin dernier… qui seraitpeut-être de toute façon apparue si j’avais continuéles lavements par la voie basse.

André (novembre 2007)
Témoignage sur la gestion intestinale

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